Révision par les pairs
Lorsque votre cerveau dépense toute son énergie à maintenir votre équilibre, il n’en reste pas beaucoup pour les autres processus cognitifs. Par conséquent, de nombreux patients atteints de troubles vestibulaires ont des difficultés d’attention, de concentration et de mémoire, et peuvent se sentir désorientés et confus. Des activités qui étaient automatiques, auxquelles vous n’aviez jamais à réfléchir auparavant, vous demandent de la réflexion et d’être concentrés. Heureusement, il existe des moyens de surmonter ces difficultés et d’améliorer leur fonctionnement.
Les troubles vestibulaires affectent les individus physiquement ET psychologiquement. Ces troubles sont variables, non seulement dans leur manifestation physique, mais aussi dans leur manifestation psychologique. Et s’il est important de comprendre vos symptômes physiques, il est tout aussi important de comprendre vos symptômes psychologiques car ils peuvent souvent déclencher et/ou exacerber vos symptômes physiques.
Le terme “cognitif” n’est qu’un mot fantaisiste pour désigner la pensée. Lorsque j’utilise l’expression “aspects cognitifs des troubles vestibulaires”, je fais référence à la façon dont votre trouble vestibulaire affecte votre capacité à penser, plus précisément à être attentif et concentré, à se souvenir, à raisonner et à résoudre des problèmes.
La Désorientation et la confusion sont courantes pendant les phases aiguës Des troubles vestibulaires. Dans ces moments très effrayants et perturbants, il se peut que vous ne sachiez pas qui vous êtes et où vous êtes, l’heure de la journée, etc. Heureusement, ces moments sont relativement éphémères. À mesure que les symptômes physiques s’estompent, la clarté et la compréhension reviennent.
Les troubles vestibulaires peuvent interférer avec notre charge cognitive. L’énergie cognitive est limitée pour tout le monde. Si vous utilisez une grande partie de cette énergie pour maintenir l’équilibre et rester stable (ce qui se fait normalement de manière automatique), il est peu probable qu’il vous en reste beaucoup pour d’autres activités. Par conséquent, la fatigue cognitive s’installe. Les activités que vous aviez l’habitude d’accomplir avec facilité et sans trop d’efforts vous demandent maintenant beaucoup plus de concentration et d’attention, ce qui réduit vos ressources pour d’autres tâches et vous oblige à vous reposer ou à faire des siestes. La spontanéité disparaît.
Les troubles vestibulaires nuisent à l’attention et à la concentration. Les troubles vestibulaires interfèrent avec votre capacité d’attention et de concentration. Vous pouvez trouver qu’il est difficile de rester concentré pendant une période prolongée. Vous pouvez être facilement distrait(e) par des stimuli externes (le bruit des autres personnes qui parlent, la télévision) et internes (vos pensées et vos sentiments). Le fonctionnement multitâche, c’est-à-dire la capacité de faire et de suivre deux activités en même temps, peut également être compromis. Un autre domaine de l’attention/concentration souvent affecté chez les personnes souffrant de troubles vestibulaires est le séquençage. Par exemple, vous pouvez vous surprendre à mélanger des sons en parlant ou à inverser des chiffres ou des lettres en parlant ou en écrivant. Vous pouvez avoir du mal à suivre des instructions, à remplir des formulaires, à suivre une recette, à suivre une conversation ou l’intrigue d’un film.
Les compétences visuelles interfèrent avec les aspects perceptifs du fonctionnement cognitif. En raison du lien complexe entre le système vestibulaire et le système visuel, les problèmes liés aux tâches visuo-spatiales sont courants chez les personnes souffrant de troubles vestibulaires. La coordination œil-main peut ne pas être très bonne, la perception de la profondeur peut également être déréglée.
La plainte cognitive la plus courante que j’ai entendue au cours de mon expérience clinique auprès de personnes souffrant de troubles vestibulaires est celle des difficultés de mémorisation. Et le problème semble concerner davantage la mémoire à court terme (se souvenir de ce que vous avez mangé au petit-déjeuner ce matin) que la mémoire à long terme (se rappeler le nom de votre meilleur ami d’enfance). Souvent, mais pas toujours, ce qui est perçu comme un problème de mémoire est en réalité un problème d’attention. J’aime utiliser la métaphore de ‘la banque’ pour expliquer ce phénomène. Pour déposer de l’argent sur votre compte bancaire, il y a une série d’étapes que vous devez exécuter afin de vous assurer que votre argent est correctement déposé et qu’à une date ultérieure, il sera là pour que vous puissiez le retirer. Il en va de même pour votre cerveau et le traitement des informations à stocker en mémoire. Il passe par des étapes spécifiques pour s’assurer que les informations sont “déposées” de sorte qu’elles puissent être récupérées ou “retirées” ultérieurement. À la banque comme dans votre cerveau, si les étapes ne sont pas suivies correctement, l’argent/l’information se perd et n’est donc pas disponible pour une utilisation ultérieure. La contrainte cognitive d’un trouble vestibulaire peut interférer avec ce processus de “dépôt” ou d’encodage de l’information. Ainsi, si l’information n’est jamais encodée correctement, il n’y a aucune chance qu’elle soit disponible à une date ultérieure pour être récupérée.
Imaginez qu’à l’intérieur de votre front se trouve une personne très importante, assise à un très grand bureau. Cette personne est le directeur général de votre cerveau, la personne chargée de gérer, de superviser et de coordonner toutes les fonctions de votre cerveau. Plus précisément, cette personne est responsable de l’organisation, de la résolution des problèmes, de la prise de décision et de l’auto contrôle. En outre, cette personne vous procure un sentiment de certitude interne, vous permet d’organiser vos pensées et d’exécuter vos projets, de façon apparemment automatique. Ces capacités sont désignées sous le nom de fonctionnement exécutif. Malheureusement, en présence d’un trouble vestibulaire, votre fonction exécutive peut ne pas fonctionner très bien. Cette personne est endormie sous le bureau ! Surchargé de travail, manquant de ressources, il est tout simplement débordé, et cet automatisme sur lequel vous vous reposez si facilement a disparu. Les actions, même les plus simples, comme s’habiller le matin, peuvent être complètement désorganisées… et désordonnées. Vous pouvez avoir du mal à décider ce que vous allez prendre au petit-déjeuner. Des activités qui étaient automatiques, auxquelles vous n’aviez même pas à réfléchir auparavant, doivent maintenant être méticuleusement concentrées et réfléchies.
Les difficultés décrites ci-dessus peuvent, et malheureusement le font souvent, interférer de manière significative avec la vie quotidienne. En réaction à ces perturbations cognitives, vous pouvez avoir l’impression que vos capacités ont diminué, tant à la maison qu’au travail. Cependant, ce ne sont pas vos capacités qui sont diminuées. C’est votre énergie cognitive qui est épuisée parce qu’elle est utilisée pour une fonction pour laquelle ce n’était pas nécessaire avant de souffrir d’un trouble vestibulaire. Lire est laborieux, utiliser l’ordinateur est douloureux et frustrant, gérer ses comptes est presque impossible. Ou, si cela est possible, vous faites les choses très différemment de la manière dont vous les faisiez auparavant. Par exemple, vous pouvez constater que vous opérez à un rythme plus lent, que vous avez besoin de beaucoup plus de temps pour accomplir des tâches qu’auparavant, ou que vous avez besoin de l’aide des autres. Vous avez peut-être trouvé une approche plus simpliste pour accomplir des tâches, une approche qui permet de faire le travail, mais pas de manière aussi satisfaisante. Vous pouvez également avoir du mal à vous orienter dans les grands supermarchés ou les grands magasins.
Heureusement, il existe des moyens de confronter et de surmonter ces difficultés et d’améliorer le fonctionnement. Le tableau ci-dessous associe chaque problème évoqué ci-dessus à une série de stratégies d’adaptation que vous pouvez utiliser pour minimiser et/ou compenser ces difficultés. Le repos, une bonne alimentation et un exercice physique approprié sont également des éléments clés de la gestion des difficultés cognitives.
La participation à un traitement offre une attention individualisée à vos problèmes spécifiques tout en vous apportant normalisation, validation et soutien. L’aide professionnelle commence parfois par une évaluation neuropsychologique. Cette évaluation peut fournir des informations détaillées sur vos fonctions cognitives. Elle identifie vos forces et vos faiblesses, les domaines dans lesquels vous fonctionnez normalement et ceux dans lesquels vous avez des problèmes. Les résultats de cette évaluation permettent de formuler des recommandations de traitement, généralement dans le cadre d’une rééducation cognitive. La rééducation cognitive peut être effectuée par un ergothérapeute, un orthophoniste ou un psychologue. La première étape consiste à améliorer la prise de conscience et l’auto surveillance des difficultés. Une fois les problèmes clairement identifiés et compris, deux voies sont possibles : (1) la rééducation cognitive (une thérapie physique du cerveau) pour remédier aux tâches ou fonctions qui vous posent problème et (2) l’apprentissage de stratégies compensatoires. Dans le cadre de la rééducation cognitive, les compétences (telles que l’attention et la concentration) sont pratiquées et renforcées par le biais de divers exercices. L’apprentissage de stratégies compensatoires consiste à utiliser les points forts pour surmonter les points faibles et à développer une “boite aux outils” que vous pouvez utiliser pour contourner les zones problématiques.
Par le Dr Rachel Bilgrei, PsyD
Traduit par des bénévoles avec l’Association des Désordres Vestibulaires (ADeV) et GDR Vertige
©2014 Association des troubles vestibulaires
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