Qu’est-Ce Que Le Syndrome De La Troisième Fenêtre ?
Le syndrome de la troisième fenêtre décrit un groupe de troubles de l’oreille interne résultant d’une anomalie de pression et/ou de liquide des structures de l’oreille interne. La plus connue est la déhiscence du canal semi-circulaire supérieur (CSCS), mais il en existe d’autres types. Ces anomalies peuvent entraîner des symptômes vestibulaires tels que des vertiges, un déséquilibre et une difficulté à focaliser les yeux, ainsi que des symptômes auditifs tels qu’une perte d’audition, un acouphène pulsatile, et une sensibilité aux sons forts. Heureusement, ce groupe de troubles peut souvent être traité, médicalement ou chirurgicalement. Lisez ce qui suit pour en savoir plus sur les symptômes, les causes et les traitements de ce trouble.
Quelles Sont Les Causes Du Syndrome De La Troisième Fenêtre ?
L’oreille interne est un système de détection de la pression.
L’oreille interne comprend deux structures principales : la cochlée (l’organe de l’audition) et les canaux semi-circulaires et otolithes (les organes du vestibule et de l’équilibre). Bien que ces organes aient un aspect et des fonctions différents, leur fonctionnement est assez similaire.
Les organes auditifs et vestibulaires sont des tubes remplis de liquide, contenant de petits poils sensibles aux changements de pression. Lorsque la pression fait bouger le liquide à l’intérieur de ces structures, le liquide fait bouger les poils, ce qui crée des signaux électriques que les nerfs auditifs et les nerfs de l’équilibre envoient ensuite au cerveau pour interprétation.
Le son est un changement de pression
Dans le système auditif, le son (qui est simplement un changement de pression dans l’air) pénètre dans l’oreille par le conduit auditif, ce qui fait vibrer le tympan et les osselets présents dans l’oreille moyenne. Cela crée des changements de pression au niveau de la fenêtre ovale, un couvercle flexible qui met en mouvement les liquides présents dans l’oreille interne. Après avoir traversé l’organe auditif, les ondes de pression sortent par un second couvercle flexible à l’autre extrémité, la fenêtre ronde. La fenêtre ronde agit comme un évent qui permet à la pression de s’échapper.
Imaginez ces changements de pression comme le flux de circulation sur une route très fréquentée à un carrefour. Pour que le trafic puisse franchir le feu de signalisation, l’intersection doit être dégagée. S’il y a une barrière en béton à l’extrémité du carrefour, le trafic s’accumulera et finira par reculer jusqu’au feu de signalisation. Le “trafic”, ou la pression sonore, doit circuler librement dans l’organe auditif pour stimuler le nerf auditif.
LES MOUVEMENTS CRÉENT DES ONDES DE PRESSION DIFFÉRENTES DANS CHAQUE OREILLE
Dans le système d’équilibre, les mouvements du corps et de la tête créent des ondes de pression à l’intérieur des organes vestibulaires. Lorsque vous vous déplacez dans une direction, le liquide pousse les les cils à la surface des cellules de ces organes dans la direction “on”, ce qui augmente les signaux électriques envoyés au nerf de l’équilibre. Dans le même temps, du côté opposé, les cils sont poussés dans la direction “off”, ce qui diminue l’activité électrique. Le cerveau compare les informations provenant de ces deux organes pour déterminer votre direction et votre vitesse. Si l’un des organes fournit des informations qui ne correspondent pas à celles de l’autre, vous pouvez vous ressentir des troubles de l’équilibre allant de la simple instabilité à un important vertige.
LA TROISIÈME FENÊTRE LAISSE ÉCHAPPER LA PRESSION
Dans les deux parties de l’oreille interne, vos organes sensoriels dépendent d’un équilibre parfait de pression pour traduire les informations qu’ils reçoivent du monde extérieur en signaux nerveux. C’est un peu comme un pneu de voiture qui doit avoir la pression parfaite pour rouler en douceur. Le syndrome de la troisième fenêtre survient lorsque les organes ou les tissus environnants présentent des “fuites”. En d’autres termes, la pression à l’intérieur est instable en raison d’une faiblesse ou d’un trou dans l’os ou les tissus. Pensez à ce qui se passe lorsque vous essayez de conduire avec un pneu crevé. La voiture vacille et vous avez du mal à contrôler sa direction. De même, les organes de l’audition et de l’équilibre finissent par envoyer des messages confus au cerveau, que ce dernier interprète comme des changements soudains dans l’audition ou les mouvements de la tête. Il en résulte toute une série de symptômes décrits ci-dessous.
Types de syndrome de la troisième fenêtre
Le syndrome de la troisième fenêtre peut survenir en cas de faiblesse ou d’ouverture qui perturbe la pression dans les tissus ou les os de l’oreille interne. C’est pourquoi il existe plusieurs sites potentiels pour ce problème :
- Au niveau des zones de contact potentiel entre les vaisseaux sanguines et les organes de l’audition ou de l’équilibre
- Au niveau des zones de contact potentiel entre un nerf et les organes de l’audition ou de l’équilibre
- Au niveau de l’os à l’interface entre l’oreille moyenne à l’oreille interne, entre la méninge et l’oreille interne
- Au niveau orifices reliant les organes de l’audition et de l’équilibre à leur système d’alimentation en liquide
Ces anomalies peuvent être causées par :
- des différences dans la forme du crâne et des organes
- une tendance génétique à développer le trouble
- un traumatisme crânien
- une intervention chirurgicale
- des événements majeurs modifiant la pression – barotraumatisme, efforts (comme lors de l’haltérophilie ou d’un accouchement difficile par voie basse)
- Autres troubles qui perturbent l’oreille interne, comme les excroissances, les tumeurs ou les infections
- Pression intracrânienne élevée
Symptômes du syndrome de la troisième fenêtre
Comme vous l’avez compris, le syndrome de la troisième fenêtre peut avoir plusieurs origines et causes, c’est pourquoi les symptômes peuvent varier d’une personne à l’autre. Certaines personnes ne présentent que des symptômes auditifs, d’autres des symptômes touchant l’équilibre et des vertiges, et d’autres encore les deux à la fois.
SYMPTÔMES VESTIBULAIRES COURANTS
Vertiges, en particulier lors de l’audition de sons forts
Vertiges en cas d’effort physique, comme soulever un objet lourd, tousser, éternuer ou se moucher
Difficulté à garder un regard stable en entendant des sons forts, ou en cas d’effort physique, de toux, d’éternuement ou de mouchage.
SYMPTÔMES AUDITIFS COURANTS
Entendre sa propre voix plus fort que la normale
Entendre d’autres bruits internes anormaux, tels que les battements du cœur, les mouvements des yeux, le clignement des paupières
Perte auditive avec un schéma particulier (qui peut être déterminé par un test auditif)
Sensibilité aux sons forts
Acouphènes, c’est-à-dire la présence de bourdonnements, de sifflements ou d’autres sons dans les oreilles qui ne proviennent pas d’une source sonore extérieure ; certaines personnes atteintes du syndrome de la troisième fenêtre ont des acouphènes pulsatiles, c’est-à-dire des acouphènes qui suivent un rythme régulier, comme les battements du cœur.
AUTRES SYMPTÔMES
Brouillard cérébral ou problèmes de mémoire
Difficultés à se repérer dans l’espace (sentiment de désorientation)
Anxiété et crises de panique
Diagnostic
Si votre professionnel de santé suspecte un syndrome de la troisième fenêtre, vous consulterez généralement un oto-rhino-laryngologiste pour un examen. Les tests suivants peuvent ensuite être utilisés pour établir un diagnostic :
TEST AUDITIF
Un audiologiste mesurera vos réactions à des sons de différentes hauteurs. Les personnes atteintes du syndrome de la troisième fenêtre présentent souvent une perte auditive qui suit un schéma particulier impliquant une perte de sensibilité à certains types de sons graves. Dans certains cas, l’audition peut être anormalement sensible, c’est-à-dire supérieure aux seuils d’audition normaux.
POTENTIELS MYOGÉNIQUES ÉVOQUÉS PAR LE VESTIBULE CERVICAL (CVEMP)
Ce test simple et non invasif mesure un réflexe musculaire en réponse à un son. Des capteurs collants (électrodes) seront placés sur votre cou. En portant des écouteurs, vous écouterez des impulsions fortes ou des clics. En même temps, vous soulèverez la tête et la tournerez d’un côté. L’équipement mesurera la façon dont vos muscles réagissent lorsque vous entendez des sons forts, et il s’agit d’un réflexe normal. Les personnes atteintes du syndrome de la troisième fenêtre présentent souvent des seuils anormalement bas lors de ce test. En d’autres termes, leurs muscles réagissent à des sons plus faibles que la normale.
POTENTIELS MYOGÉNIQUES ÉVOQUÉS PAR LE VESTIBULE OCULAIRE (OVEMP)
Ce test est similaire au CVEMP mais mesure la réponse d’un autre capteur. Après avoir entendu des sons forts, au lieu de mesurer une réponse dans le cou, la réponse est mesurée à partir de l’un des muscles oculaires. Là encore, il s’agit d’un réflexe normal, mais dans le cas du syndrome de la troisième fenêtre, les patients présentent souvent une réponse anormalement importante ou réagissent à des fréquences élevées qui ne suscitent normalement pas de réponse.
ÉLECTROCOCHLÉOGRAPHIE (ECOG)
Ce test simple et non invasif mesure les informations électriques produites par l’organe auditif en réponse à des sons forts. Généralement, un petit capteur (électrode) est placé profondément dans votre conduit auditif. Vous écoutez ensuite des sons forts pendant que l’équipement enregistre les réponses de votre organe auditif. Les personnes souffrant de certains types de syndromes de la troisième fenêtre ont des réponses anormales à ce test.
TEST VESTIBULAIRE
Les patients suspectés d’être atteints du syndrome de la troisième fenêtre doivent subir une batterie complète d’examens vestibulaires. Cela permet de définir la fonction vestibulaire sous-jacente du patient (de la même manière qu’un test d’audition permet de définir sa capacité auditive) et peut contribuer au diagnostic du syndrome de la troisième fenêtre. Les tests vestibulaires qui peuvent aider au diagnostic comprennent le test de Tullio (évaluation du nystagmus – mouvements saccadés des yeux – en mettant du son dans l’oreille), le test de la fistule (évaluation du nystagmus ou du déséquilibre avec une pression appliquée sur le tympan) et le test de Valsalva (évaluation du nystagmus lorsque le patient fait un effort).
IMAGERIE PAR TOMODENSITOMÉTRIE
Un scanner à haute résolution du crâne doit être réalisé pour confirmer le diagnostic. Cependant, le scanner peut manquer une zone d’os absent si elle est trop petite, ou révéler des zones amincies de l’os qui n’entraînent pas de symptômes. Le diagnostic est donc établi sur la base de critères et de tests multiples.
DIAGNOSTIC
Le diagnostic du syndrome de la troisième fenêtre repose sur trois éléments :
- des antécédents et des symptômes compatibles avec le syndrome de la troisième fenêtre,
- des tests diagnostiques compatibles avec le syndrome de la troisième fenêtre
- un examen tomodensitométrique approprié identifiant une anomalie. L’exception à cette règle est le patient qui présente les conditions 1 et 2 mais qui n’a pas d’anomalie osseuse identifiable au scanner. Ce groupe de patients peut présenter soit une anomalie qui n’a pas encore été identifiée, soit une anomalie de la fenêtre ronde ou ovale, qui n’apparaîtra pas au scanner.
Traitement
Il existe plusieurs options pour la prise en charge des symptômes liés au syndrome de la troisième fenêtre.
MODIFICATIONS DU MODE DE VIE
Certains patients parviennent à tolérer leurs symptômes et à réduire les effets plus graves en évitant les déclencheurs tels que les sons forts et les efforts physiques.
AERATEUR TRANS-TYMPANIQUE
Certains patients, en particulier ceux qui sont sensibles aux changements de pression, peuvent être soulagés par la mise en place d’un aérateur transtympanique dans le tympan du ou des côté(s) affecté(s). Il s’agit souvent d’une intervention rapide, réalisée en cabinet, qui ne nécessite qu’une anesthésie locale. Bien que ce traitement puisse aider certains patients, ils sont très peu nombreux et il s’agit généralement de patients qui présentent un dysfonctionnement concomitant de la trompe d’Eustache.
CORRECTION CHIRURGICALE
Selon l’emplacement de la “troisième fenêtre”, une réparation chirurgicale peut être envisagée. Dans de nombreux cas, la zone affectée peut être bouchée ou réparée chirurgicalement, ce qui permet d’éliminer efficacement la fuite de pression à l’origine du problème. Une autre approche consiste à renforcer les fenêtres de l’oreille moyenne. Bien que cette méthode soit beaucoup moins invasive, son taux de réussite est généralement plus faible. Dans de nombreux cas, l’intervention chirurgicale permet de mettre fin aux symptômes gênants. Elle peut toutefois entraîner des modifications du fonctionnement de l’oreille interne. Certains patients ont besoin d’une rééducation vestibulaire après l’intervention pour se remettre de ces changements. Il est important de noter que la chirurgie peut soulager les symptômes liés aux vertiges, aux étourdissements et à l’autophonie (audition trop forte des sons internes), mais qu’elle n’est habituellement pas recommandée pour la seule indication de perte auditive.
Conclusions
Le syndrome de la troisième fenêtre regroupe des symptômes secondaires à la façon dont l’oreille interne gère la pression. Ce phénomène est dû à une ouverture ou à une faiblesse des structures osseusesentourant l’oreille interne. Lorsque l’oreille interne subit des changements de pression inhabituels ou soudains, cela peut entraîner toute une série de symptômes liés à l’audition et à l’équilibre. Comme la pression change en fonction de l’environnement (y compris le son) et de l’activité physique, les patients peuvent ressentir un large éventail de symptômes qui vont et viennent.
Il est important de procéder à divers tests de diagnostic pour déterminer si vous souffrez du syndrome de la troisième fenêtre. Le diagnostic n’est jamais posé sur la seule base d’un scanner. En raison de sa cause physique évidente (défaut localisé de couverture osseuse de l’oreille interne), le syndrome de la troisième fenêtre est l’un des rares troubles vestibulaires pour lesquels une réparation chirurgicale directe peut être possible.
Par Yonit Arthur, AuD, revue par Gerard Gianoli, MD, FACS
Traduction en Français par ADeV